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disparition - Page 2

  • L'OUTIL: Chapitres 1 a 9 dans l'ordre :Une nouvelle pour les vacances

    rhododendron_2.jpg

    pic avec manche.gifchampignon.jpgl’outil

    de Louis Fernand Olbec

     

     

    ""l'éternel dit à Caîn,où est ton frére Abel ? Il répondit je ne sais pas,suis je le gardien de mon frére ?" Genése ch.4/9. 

    En allant aux champignons . . .

     

    C’est un outil de bûcheron, j’ai oublié son nom. Disons un pic. Il est assez lourd et doit servir, il me semble, à faire glisser les bois. Mais que fait cet outil dans la forêt ?  La dernière coupe de bois a eu lieu Il y a déjà plus de quatre ans. L’outil n’a pas été oublié le long d’un chemin ou posé contre un arbre, il se cache dans des rhododendrons, roses azalées, en pleine pente juste avant les aulnes couchés d’un couloir d’avalanche.

    Mon panier est déjà bien rempli de russules charbonnières, je le compléterai en descendant avec quelques baveux ou quelques sanguins. J’aime les mélanges dans la sauteuse et surtout dans l’assiette. Il est temps de rentrer.

    J’emmène l’outil. Son propriétaire, si je le trouve, sera peut être content de le récupérer. Du moins je le crois. L’avenir me dira le contraire .Je glisse l’anse du panier dans le manche épais, le porte à l’épaule et entame la descente. L’outil est lourd ; il me scie l’épaule à chaque pas. Dans une épingle à cheveux, Je le dépose dans les pommes de pin  et ne résiste pas à cueillir deux petits bolets élégants avec leurs jolies robes, élégants mais baveux, un petit cèpe de bordeaux et quelques lactaires délicieux  bien rouges dans les aiguilles sur le talus. Le panier maintenant est vraiment plein. L’anse de nouveau glissée dans l’outil, je change d’épaule et parvient ainsi à petits pas à l’entrée du village. Je croise un ancien qui s’intéresse à mon panier.

    -« la cueillette a été bonne ? »

    -« Pas mal, oui. J’ai surtout trouvé des charbonnières. »

    -« C’est du bon! Du très bon. Je vois que vous avez aussi quelques sanguins et même un cep, il y a de quoi faire un joli plat. »

    -« J’ai trouvé cet outil dans les rhododendrons par la haut, quelqu’un l’a sans doute perdu. Sauriez-vous me dire à qui il appartient ? »

    -« Voyons ça de près ! »

    L’ancien met ses lunettes, se saisit de l’outil, le tourne et le retourne.

    -« Voyez ici en haut du manche, il y a deux points noirs tracés à la pointe de feu, c’est la marque de mon cousin Emile. Le pic est bien rouillé, il a du passer l’hiver dehors. Je me demande comment mon cousin a pu perdre cet outil par ici, si loin de chez lui. Enfin, va t’en savoir où chacun fait son bois à l’automne. Si vous voulez, je lui parlerai.. »

    -« Volontiers, Robert. En attendant de lui rendre l’outil, je le mets dans ma réserve ».

    Deux jours plus tard, alors que j’installe ma valise dans la voiture, je rencontre le Robert.

    -« Alors ces champignons ? Ils étaient bons ? »

    -« oui, merci, on a fait bonne chair et on est encore vivant, comme tu vois. Et toi, tu as vu ton cousin ? »

    -« Oui, mais le pic n’est pas à lui. Du moins, Il n’en veut pas. Bizarre, car je ne vois personne d’autres dans le pays les marquer ainsi de deux points noirs. En attendant de trouver son propriétaire, vous n’avez qu’à le garder. »

    L’outil est resté dans ma réserve, jusqu’à la Toussaint. De retour au pays, j’ai revu le Robert. Il était intrigué .Il avait en effet rencontré  l’Emile son cousin en train de descendre des troncs d’arbres. L’outil dont il se servait était marqué de deux points noirs mais il était quasiment neuf. Il l’avait donc, sans doute, acheté chez le quincailler derrière la sous préfecture, ou bien été voir le dernier taillandier de la vallée pour s’en faire forger un .Mais pourquoi n’a-t-il pas voulu récupérer l’ancien ?

    Robert ne comprend pas mais m’invite à garder l’outil.

    -«  Si quelqu’un te demande un Sapi, ne sois pas étonné. C’est comme ça qu’on appelle ce pic dans la région. »

    -« Comme tu ne fais pas toi-même ton bois, Je ne vois pas bien ce que tu pourrais en faire, mais après tout, ça ne mange pas de pain, la semaine prochaine mes neveux viennent pour faire le bois, j’en aurais peut être besoin. »

    CHAPITRE 2 Le soupçon

     

    Les choses en seraient restées là, mais c’était compter sans la Cécile la femme du Robert. Quand il lui raconte cette histoire d’outil, elle fait de suite le rapprochement avec la disparition d’Octave, il y a quelques années déjà.

    -« Te souviens-tu ? Les gendarmes ont interrogé Emile qui était en dispute avec Octave mais comme on n’a jamais rien trouvé, ni son corps, ni l’arme d’un crime, l’affaire a été classée. En attendant le mystère de la disparition d’Octave reste entier. »

    -« Je ne vois pas comment cette vielle affaire à quelque chose à voir avec l’outil que j’ai retrouvé dans les rhododendrons ? »

    -« Comment cela n’a rien à voir ? Et si ton pic était l’arme du crime ? La disparition d’Octave a eu lieu à l’automne quand tout le pays était au bois. On peut tout imaginer. Une dispute violente des deux cousins dans la forêt, un coup de crochet malencontreux qui tue Octave. L’Emile tournerait le dos à son crime, il ne voudrait plus de cet outil marqué du sang de sa victime. Souviens toi quand Caïn a tué Abel, il a été se cacher dans une tombe, a écrit Victor Hugo, mais l’œil de Dieu était dans la tombe ».

    -« Ma pauvre Cécile, voila que tu phantasme et va chercher le secours de Hugo. Laisse donc Victor tranquille, il y a longtemps qu’il n’a plus mal aux dents. Et puis, surtout ne va pas raconter cette histoire dans le pays. Tu mettrais le feu entre les familles. »

    Les soupçons de Cécile ont intrigué Robert. Discrètement, un jour qu’elle était partie tailler la bavette chez la Marguerite, il s’est rendu dans la réserve pour observer de près l’outil. Il est vrai que, manié à bout de bras, ce pic pouvait être une arme terrible. Mais de là à imaginer le pire, il y a plus d’un pas. Il se surprend, quand même, à regarder s’il ne reste pas quelques traces de sang sur la pointe de l’outil. La disparition de Gustave date. Elle a eu lieu il y a près de 4 ans ! Avec les hivers de par ici, la pluie et surtout la neige, la pointe de l’outil a été bien nettoyée. Sa couleur est quand même sang séché. Robert mouille son doigt et frotte, c’est de la rouille, rien que de la rouille. Il faudrait faire appel à quelque police scientifique comme on en voit dans des séries policières à la télé. Mais qui s’intéresse encore à la disparition d’une tête de lard comme Octave ?


     

    Un vacancier trouve  en forêt un pic de  bucheron marqué de deux points noirs .Son propriétaire présumé n’en veut pas.  Cela éveille les soupçons de Cécile qui se souvient  de la disparition mystérieuse  d’Octave 4 ans auparavant.

    CHAPITRE 3 Octave

     

    Octave était procédurier, il avait fait toute sa vie des procès. Pour différents prétextes la moitié du pays avait du se rendre au tribunal. Personne n’était épargné même pas les membres de sa famille. Un entrepreneur pour une fuite dans la tuyauterie, une contestation au moment du partage, une querelle autour d’une borne déplacée, un dépôt de matériau sur le bord de sa propriété, un arbre abattu en limite de cadastre. Les procès trainaient en longueur, ils attisaient la haine des parties adverses et faisaient le bonheur des juges et des avocats qui le «  grugeaient »  comme le Perrin de la fable(*), ce fameux juge qui avait grugé l’huître et partagé à chaque partie les écailles vides. Ces procès ne lui attiraient pas la sympathie des gens du village, Octave le savait. Il devenait de plus en plus taciturne, il s’enfermait dans son mutisme. Il participait le moins possible à la vie du village. Ses seules visites étaient pour la cure, car le bon prêtre l’écoutait avec un bon sourire et débouchait pour lui son meilleur vin blanc. Octave sortait de là réconforté avec le sentiment d’être compris.

    Un beau jour d’automne, Octave est parti de bon matin, seul dans la forêt, la hache  et le pic sur l’épaule pour faire son bois, il n’est jamais revenu. En fin d’après midi, quand la montagne est devenue violette, et que s’est allumée l’étoile du berger, sa femme s’est inquiétée. On a prévenu le maire, puis le garde-forestier et enfin la gendarmerie à la sous- préfecture. Le lendemain dès le lever du jour une équipe s’est mise en route avec le garde et deux gendarmes en direction des bois qui lui étaient attribués. Octave avait beau être le mal aimé, c’était quand même un enfant du pays. La troupe s’est rendue au delà du torrent qui coupe en deux la forêt, puis est montée dans un chemin en lacet. Le garde en tête donnait le rythme, la troupe suivait allégrement. Seuls peinaient les gendarmes. Ce qui ne déplaisait pas à la troupe. Ils s’amusaient de les entendre souffler. Dans la clairière, ils se sont tous assis sur quelques troncs de vieux hêtres, ils ont sorti casse croûte et vin blanc et mis d’accord sur la tactique la meilleure. On séparerait la troupe en trois équipes, chacune dans une direction avec un circuit qui les ramènerait au point de départ en début d’après midi pour un pique nique un peu plus sérieux. Si une équipe trouvait Octave, elle le ramènerait si possible à ce même point de départ et préviendrait les autres en sonnant de la trompe. C’est le garde qui dirigeait la manœuvre. Les gendarmes avaient perdu toute autorité en soufflant comme des bœufs dans la montée. Ils auraient bien demandé d’être dispensés de la recherche mais ils n’osèrent pas. Trois heures durant, les équipes ont battu les fourrés sans rien trouver. Octave s’était volatilisé. La troisième équipe avec le garde en tête s’est attardée sur un chantier ouvert récemment avec deux sapins abattus et un troisième découpé et en partie traîné dans la pente. C’était un lot attribué à Octave. L’équipe a cherché tout alentour mais n’a rien trouvé. Apparemment, il avait commencé la veille à travailler. Une bonne heure pour chacun des sapins, une demi-heure pour la glisse. Il devait être l’heure du casse croûte quand Il a arrêté le chantier et ne l’a jamais repris. Que s’est il passé  ? S’est il senti mal ? Il aurait voulu descendre chercher de l’aide et se serait évanoui quelque part dans la descente ? Les hypothèses vont bon train. Finalement, les trois équipes décidèrent de se rendre sur le chantier inachevé d’Octave et de descendre en tirailleur jusqu’à l’orée du bois en direction du torrent. Alourdie par le jambon de pays et la tomme bien arrosée, la troupe se mit en marche lentement jusqu’aux trois sapins abattus et de nouveau elle se sépara. Cette portion de forêt était  très dense et la dernière tempête avait fait du dégât. Ils durent enjamber des troncs de mélèzes et de sapins enchevêtrés, patauger dans des fondrières alimentées par des sources abondantes, contourner des halliers d’aulnes blancs et d’églantines, escalader des rochers pleins de mousse, de fourmilières et de rhododendrons en fleurs. Le petit blanc était dans la chemise et toujours pas d’Octave. La troupe rentra bredouille au village et se rendit à la mairie. Le maire avait tiré dans la salle du mariage le tableau noir de l’école. Il demanda au garde de s’expliquer avec une craie à la main. Tout le village était là. Le garde traça les parcours de la journée. Et chacun fût amené à dire son point de vue.

    -« Vous avez perdu votre temps dit le grincheux de service. Je connais Octave, s’il s’était senti malade, il n’aurait pas bougé en plein midi. Il aurait commencé par faire sa sieste et serait mort en dormant. On l’aurait retrouvé sur place. Il s’est passé quelque chose. Quelqu’un qui lui en veut et il y en a quelques uns au village. Quelqu’un, lui a joué un tour. Il faut chercher de ce coté là ».

     

     

     

     

    * L’huitre et les plaideurs.  La Fontaine


     

    CHAPITRE 4 Les recherches continuent

     

    Tout un village se mobilise  à la recherche d’Octave qui a disparu. C’était il y a 4 ans

     

     

     

    -« Puisque tu es si malin,  a dit le Maire au grincheux, je compte sur toi demain pour continuer les recherches. Mauvais tour ou pas, mort ou vivant, il nous faut retrouver Octave. Je demande au garde de prolonger les recherches. Profitons, Il fait encore beau. Si on ne le retrouve pas, on aura au moins essayé. »

    Le garde alors, à la craie, indique les endroits non fouillés où Octave  pourrait se retrouver et à grands coups de flèches détermine la stratégie pour le lendemain.

    Ils étaient trente le lendemain de bon matin  devant la mairie avec la musette bien garnie, chapeau sur la tête et bâton à la main. De mémoire d’homme, on ne se souvenait d’une telle battue. Le dernier rassemblement de tous les hommes valides avait eu lieu l’année où par décret du préfet on a du prélever les 15 sangliers qui faisaient du dégât dans les jardins. Cette fois ci, seuls les gendarmes étaient armés, et dans cette nature immense et accidentée leur petit révolver faisait piètre figure à l’image d’ailleurs de leur peu de souffle.

    Le soir, toute la troupe était de retour, les hommes étaient épuisés et Octave toujours introuvable. A la mairie le garde reprend sa craie, mais le cœur n’y est plus. Les gendarmes discrètement se sont renseignés sur les inimitiés qu’avaient suscitées les différents procès intentés par Octave. Ils annoncent  que le lendemain ils poursuivront leur enquête soit en convoquant certains à la mairie soit en se rendant chez d’autres à domicile. Ils demandent à la population de ne pas tirer des conclusions hâtives de telle ou telle interrogation. Le maire conclut en invitant chacun à aller se reposer et à se tenir le lendemain à la disposition des gendarmes.

    Les notes de gendarmerie signaleront que pratiquement tous les hommes le jour de la disparition d’Octave étaient à faire du bois. Certains ont entendu au loin Octave abattre ses sapins. Personne ne l’a vu ni entendu de tout l’après midi. Emile interrogé plus longuement à cause du dernier procès en cours était à faire du bois bien loin d’Octave avec ses fils. Il avait bien quitté son chantier vers midi mais pour aller donner la main à son oncle qui confirme. Il était revenu dans l’après midi et avait travaillé jusqu’au soir. L’absence de cadavre et de trace de crime classe d’elle-même l’affaire. La disparition d’Octave  restera un mystère pour tout le village mais ne fera pas taire les langues.

     

     

     


     

    CHAPITRE 5 Cécile parle

     

     

    4 ans après la disparition d’Octave, parti faire son bois, la découverte d’un pic  relance l’enquête.

     

     

     

    Il a fallut quelle le dise à la Marguerite, sa voisine. Cécile n’a pas su tenir sa langue et tout le village est au courant de la découverte du pic aux deux points noirs dans la forêt.

    Robert vint me voir :

    -« Tu as toujours le pic trouvé aux champignons ? »

    -« Oui, dans ma réserve, tu en as besoin ? Tu as du bois à descendre ? »

    -« Non. Mais c’est que tout le monde est au courant de ta trouvaille, car ma Cécile a parlé. On chuchote dans le dos d’Emile. Je me demande si le pic ne deviendrait pas « une pièce à conviction » comme ils disent. L’affaire est classée, mais on ne sait jamais. »

    -« Que veux-tu dire par pièce à conviction ? Accuserait-on Emile d’avoir tué Octave avec le pic. Serait-ce l’arme du crime ? Dois-je aller voir les gendarmes pour leur montrer ma trouvaille ? Crois tu que cela pourrait rouvrir l’enquête ? Est-ce souhaitable, quatre ans après ? Les choses sont faites maintenant, cela ne fera pas revenir Octave. »

    -« c’est vrai, mais au moins on aurait le cœur net, ça ferait taire les rumeurs. »

    -« Crois tu que la mémoire d’Octave vaut la peine d’envoyer quelqu’un en prison le reste de ses jours. Il a « emmerdé » tout le pays durant toute sa vie, il n’a eu sans doute que ce qu’il méritait. »

    -« Tu vas un peu fort, quand même. Tout baptisé a droit à une sépulture digne. Si on trouvait l’assassin, il dirait l’endroit où il a caché le corps, on pourrait inhumer Gustave dans le cimetière de la commune, à coté de ses parents, plein Sud, l’église l’abritant des vents du Nord. C’est quand même mieux que d’être rogné par les fourmis dans quelque faille de rocher où son assassin l’a sans doute  jeté.

    -« Rogné par les fourmis ou bouffé par les vers, je ne vois pas la différence. Il y a près de 4 ans maintenant, l’Octave ne fera plus de procès à personne. Il a fait travailler les juges de son vivant, je ne voudrais pas qu’il les fasse travailler maintenant qu’il est mort .Mais le pic, je n’en veux plus. Chaque fois que je vais aller dans ma remise, je vais le regarder, et ça va me gêner, je risque de faire des cauchemars. Si tu veux relancer l’affaire, prends le pic chez toi. »

    -«  je veux bien le prendre mais avec les ragots qui traînent, je ne veux pas traverser le village avec le pic sur le dos. Tu me l’enveloppes dans un sac en jute. Je verrai avec Cécile la suite à donner à l’affaire. »

    Et c’est ainsi que Robert s’en est allé chez lui avec ce que la Cécile  assurait être une pièce à conviction. Une pièce qui pourrait compromettre et même accuser Emile. Cécile range le pic au fond de la grange, pas question de s’en servir le lendemain pour descendre le bois ; de toute façon, il est en mauvais état et puis, une pièce à conviction, ce n’est déjà plus un pic. Ça se respecte.


     

    CHAPITRE 6 Le proc

    Un pic retrouvé  en forêt   donnerait il la clef d’une énigme : la disparition d’Octave,  il y a 4 ans déjà.

     

    -« Monsieur le procureur » ! Cécile a sorti le plumier et la bouteille d’encre violette. « J’ai chez moi un Sapi que monsieur Fournier, vacancier habitué de notre village a trouvé à la fin du mois d’Août en allant aux champignons dans des rhododendrons dessus les combes de Montsanvierge. Les marques noires faites à la pointe de feu sur le manche, nous font penser que ce pic appartient à Emile Martin. Mais il ne veut pas le savoir. Je crois que ce pic a pu servir à tuer Octave et pourrait devenir une pièce à conviction. Je m’appuie sur le fait qu’Emile a racheté un nouveau pic et ne veut plus de l’ancien retrouvé par Monsieur Fournier et cela malgré la marque des deux points noirs qui l’identifie. Emile, il y a 4 ans maintenant, avait de bonnes raisons d’en vouloir à Octave qui lui avait fait un mauvais procès au sujet de l’abattage d’un grand frêne en limite de sa propriété. Je vous écris sans haine ni rancune envers personne mais par souci de la vérité et pour faire la lumière sur une affaire qui empoisonne la vie du village en entretenant la suspicion et en alimentant les ragots. Croyez bien, monsieur le procureur, avec tout le respect que je vous dois, à mes sentiments les meilleurs. Cécile  Martin.

    Consciencieusement, Cécile ferme la bouteille d’encre, range la sergent major dans le plumier, cachète la lettre et va de suite la poster à la borne jaune au milieu du village devant la mairie.

    Le procureur tourne et retourne la lettre reçue au courrier. Et si cette révélation éclairait d’un jour nouveau la disparition d’Octave ?

     

     

     

     

    Chapitre 7 Accusation faible- élément nouveau

     "Rentre en toi même Octave,et cesse de te plaindre

    Quoi ! tu veux qu'on t'épargne et n'as rien épargné".Cinna

     

     

    Octave parti faire son bois n’est jamais revenu. Le pic retrouvé serait il l’arme du crime ? C’est ce que pense Cécile

     

    -« Mirelle apportez moi le dossier de la disparition de Octave Rol. C’était il y a quatre ans environ, à l’automne. »

    Quelques minutes plus tard :

    « Voila monsieur ! En annexe, il y a les minutes des interrogations faites par les gendarmes le lendemain des fouilles. »

    -« Apportez les moi aussi. »

    Le procureur plonge alors avec 4 ans de distance dans un village. Il s’amuse du style « poétique »avec lequel les gendarmes décrivent les lieux .Les combes deviennent des Talwegs, les buissons d’églantine roses des obstacles naturels, le torrent d’argent un obstacle à franchir, les sapins verts couchés dans les rhododendrons fleuris sont la preuve matérielle d’un travail déjà effectué. Il faudra apprendre aux gendarmes à mettre un peu de couleur dans leur rapport. Ils ne mentionnent pas évidemment l’épuisement des gendarmes et leur difficulté à suivre les gens du pays dans cette expédition. Jointes à la description des battues, les listes des participants : 10 le premier jour, 30 le deuxième avec les noms, prénoms et matricule des deux gendarmes et le titre du garde forestier.

    Il s’attarde ensuite sur les minutes de l’interrogation d’Emile.

    -Vos fils nous ont dit que vous avez quitté leur chantier vers Midi pour aller aider votre oncle André qui travaillait au dessus ; Est-ce bien ainsi que ça s’est passé ?

    -Oui, mon oncle vous confirmera la chose. J’ai descendu ses bois.

    -A quelle heure êtes vous revenu ?

    -Sitôt fini, J’ai mangé un morceau avec mon oncle et suis descendu. Mes fils ont du vous dire   quelle heure il était.

    -Vous étiez  en procès avec Octave, avez-vous quelque chose à nous révéler sur sa disparition ?

    -Non, je suis dans l’incertitude comme tout le monde. Je ne dis pas que ça me fait de la peine mais que voulez vous, c’est comme ça.

    Les documents sont datés, signés, estampillées, immatriculés.

    Le procureur relit la lettre de Cécile. Vaut-elle une reprise du procès ? Y a-t-il un élément nouveau qui le permette ? Le fait qu’Emile ne reconnaisse pas comme sien le pic retrouvé est troublant d’autant qu’il tient habituellement à ses outils au point de les marquer. D’autre part, il a quitté ses fils, a été voir son oncle André. Aurait-il eu le temps d’aller sur le chantier d’Octave, accomplir son forfait avant de revenir voir ses fils ?

     Finalement le procureur ordonne un complément d’enquête. Deux gendarmes sont envoyés pour interroger Emile sur ce fameux pic retrouvé par monsieur Fournier. Est-ce bien le sien ? Sinon comment explique t il les deux points noirs sur le manche. S’il l’a simplement oublié et perdu dans les bois, pourquoi refuse t il de reconnaitre comme sien celui que monsieur Fournier a retrouvé ? A t il peur d’être accusé ? De quoi ?


     

    CHAPITRE 8 l’enquête continue

     

     

    Un pic retrouvé en forêt, 4 ans après la disparition d’Octave relance l’enquête : serait ce l’arme du crime ?

     

     

    Une semaine après la lettre de Cécile, l’estafette de la gendarmerie arrive au village. C’est l’été indien, les képis et les cols sont trempés de sueur .Les deux gendarmes se rendent  péniblement chez la Cécile.

    -« Vous avez écrit au procureur au sujet d’un SAPI retrouvé dans la forêt par un vacancier cueilleur de champignon ».

    -« Oui, car ce pic est surement celui d’Emile, il a la marque noire des deux coups de poinçons rougis au feu de tous ses outils. Pourquoi Emile ne veut pas le reconnaitre ? Robert, dis leur toi aux gendarmes que l’Emile poinçonne tous ses outils comme ça ! »

    -« Pouvez-vous nous montrer cet outil ? »

    -« oui, venez, il est dans la grange. »

    Les gendarmes inspectent le pic, regardent les deux marques noires avec attention.

    -« Ce peut être une pièce à conviction, nous l’emmenons. »

    -« Monsieur Fournier est-il encore au pays ? Nous voudrions prendre sa déposition et voir l’endroit exact où il a trouvé le pic »

    -« Oui, il doit être chez lui, Vous descendez, c’est la dernière maison à votre gauche. »

    Je suis en train de me raser, quand j’entends frapper à ma porte.

    -« Excusez moi, je suis encore à me raser. Ce sont les vacances ».

    -« Faites donc monsieur, nous avons le temps ». disent les deux gendarmes en s’épongeant le front. »

    Chemise passée, je propose le café à mes enquêteurs qui s’assoient bien volontiers.

    -« nous voudrions simplement savoir où et quand vous avez retrouvé le Sapi ? »

    -« C’était à la fin du mois d’Aout, le 29 exactement. Je m’en souviens car le lendemain j’avais des invités et leur ai servi mes champignons avant de faire mes valises pour rentrer au pays. Je me doutais que vous alliez venir m’interroger, tout se sait au village, alors j’ai déjà sorti ma carte et j’ai fait une croix à l’endroit où j’ai découvert le pic. »

    Le gendarme sort alors une carte d’état major identique à la mienne, l’étale et reproduit la croix à l’endroit indiqué.

    -« Quand je suis descendu avec l’outil à l’épaule, j’ai rencontré Robert qui m’a dit reconnaitre le pic de son cousin Emile à cause des deux marques noires qu’il fait au poinçon sur tous ses outils. Il m’a dit qu’il lui en parlerait mais que pour l’instant je n’avais qu’à le garder. »

    -«  A la Toussaint, je suis revenu. Robert m’a reparlé de cette affaire. Il était intrigué car l’Emile n’avait pas voulu parler de l’outil perdu. Il se servait d’un pic quasiment neuf marqué de deux points noirs aussi. C’est sa femme, la Cécile  qui en a déduit que c’était peut être l’arme du crime que l’assassin avait caché dans les rhododendrons. Voila, c’est tout ce que j’ai à vous dire. Personne ne pleure la mort d’Octave qui a embêté le monde toute sa vie. »


    CHAPITRE 9 Un suspect ou un coupable

     

    L’étau se resserre  sur Emile dont le pic été retrouvé dans la forêt, 4 ans après la disparition d’Octave.

     

     

     

    Finalement, les gendarmes frappent chez l’Emile.

    -« Bonjour monsieur, nous venons vous voir pour vous poser quelques question »

    -« Je  vous en prie, entrez ! ».

    -« Monsieur Robert Bois pense que le pic retrouvé par monsieur Fournier dans la forêt vous appartient. Il ne comprend pas que vous n’en vouliez pas. Et même sa femme Cécile se demande si Octave n’aurait pas été tué par cet outil. Qu’avez-vous à répondre ? »

    -« J’avais un différent avec Octave .Il m’avait trainé au tribunal, c’est vrai. Mais de là à le tuer, il y a quand même une marge. L’outil effectivement perdu, j’en ai acheté un autre et n’ai plus besoin du vieux qui est rouillé : Pensez ! Au bout de 4 ans !».

    -« Monsieur Fournier a retrouvé votre pic, car c’est bien votre pic n’est ce pas ? Il l’a retrouvé à cet endroit précis ! La carte développée, le gendarme montre à Emile le point marqué d’une croix. Aviez-vous une raison précise pour aller à cet endroit ? Une plante à retourner ou à glisser, un chantier à ouvrir ? »

    -« Non, je n’avais rien à faire dans ce coin et je ne comprends pas que l’outil y a été retrouvé. »

    Le brigadier se rend à l’estafette et revient avec le Sapi toujours enveloppé dans le jute.

    -« Monsieur Bois et sa femme affirment tous les deux que ces deux points noirs ici sont votre marque. »

    -« Oui, je le reconnais, mais je ne veux plus de cet outil. Il est rouillé, il va se déchausser. J’en ai acheté un autre, cela me suffit. »

    -« Votre pic ne s’est pas retrouvé par hasard à cet endroit ! »

    -« J’ai du l’oublier sur le chantier de mon oncle André, C’est ici à peu près ».

    Avec son doigt Emile désigne un point sur la carte du gendarme. 

    -« Mon oncle l’a peut être descendu pour me le rendre, mais c’est lourd ! Il l’a peut être déposé là, pensant revenir le chercher le lendemain. Va t en savoir ! Il ne m’en a pas parlé ! Les vieux ont des oublis. Il est possible même que le lendemain, il ne savait plus bien l’endroit où il l’avait déposé et ne l’a pas retrouvé. »

    -« Cet outil vous en aviez besoin pour continuer à faire glisser votre bois, vous avez du le chercher, interroger votre oncle. »

    -« Oui bien sûr, mais il a été vague dans sa réponse. Il n’était plus tout jeune vous savez et maintenant il n’est plus là. Son secret il l’a emporté dans la tombe ».

    Les gendarmes replient la carte, enveloppent le pic et s’en retournent à l’estafette. Les rideaux se soulèvent à leur passage .Que va-t-il advenir d’Emile ? Les gendarmes ont-ils enfin réussi  à trouver l’assassin ? Le mystère de la disparition d’Octave va-t-il enfin s’éclairer ? L’estafette disparait dans le virage. Le silence retombe sur le village comme les rideaux aux fenêtres, les rumeurs sont sourdes, elles sont aussi aveugles et muettes.

    Epilogue Mercredi prochain 20 octobre

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

      

     

     

    Octave parti faire son bois n’est jamais