« Allons, allons ce n’est rien » dit le copain à l’ami qui est angoissé ». Il a métaphysiquement raison Car, c’est vraiment rien, même quand on dit, c’est tout pour calmer un cauchemar d’enfant. L’angoisse à la différence de la peur est provoquée par rien. Rien du moins d’extérieur à soi. Le « pourquoi de l’angoisse » disait Heidegger, « c’est l’être au monde lui-même »(le dasein). On s’angoisse soi même.
« L’analyse existentiale du phénomène de l’angoisse nous fait atteindre une sorte de point limite dans la découverte de soi. Le pouvoir de singularisation de l’angoisse est si fort que nous devons parler d’un véritable solipsisme existential » (sz 188).(1)
Quand un jeune dit : « j’ai les boules » Il parle rarement de l’angoisse métaphysique qui pose la question du pourquoi. Pourquoi, par exemple, il y a quelque chose plutôt que rien. Son « solipsisme existential » il le vit le plus souvent dans l’angoisse « face à la liberté entendue comme capacité de se choisir soi même ».
J’ai fait cette expérience personnelle à l’adolescence lors du choix de mon orientation. Plusieurs mois d’angoisse dont je me suis libérée dés le choix et la décision prise. J’ai donc vécu un « solipsisme existential ».Rassurez vous, ce n’est pas contagieux .Pourquoi cette angoisse ne m’a plus jamais atteint ? Est-ce parce que j’ai un bon foie et une bonne cave ? Est-ce parce que je n’ai jamais eu d’arrêt dans une vie active,sinon un mois d'aout à l'hopital ? Un licenciement, une période de chômage, une retraite mal préparée, une longue maladie sont parfois des moments où l’on se poser la question de son « être au monde » et où l’on peut effectivement céder à l’angoisse.
A Gethsémani Jésus a vécu une grande angoisse. « Mon âme est triste à mourir » a-t-il dit. Il était mis devant un choix douloureux. Aller jusqu’au bout de sa mission allait le conduire à boire la « coupe jusqu’à la lie ».Je n’ai jamais eu de choix aussi douloureux à faire, grâce à Dieu.
Je crois que ce qui m’a aidé, c’est de vivre ma vie au présent : présent présent avec « la vision » rassurante des choses que donne un bon tempérament , présent passé avec « la mémoire » actualisée et présent futur avec « l’attente » joyeuse(2)), selon le conseil de l’évangile : « Ne vous inquiétez pas pour le lendemain : le lendemain s’inquiétera de lui-même. A chaque jour suffit sa peine ».(3) « le soin de chaque jour à chaque jour suffit »(4). S’endormir chaque soir dans l’abandon en Dieu comme si c’était son dernier soir, se réveiller chaque matin comme si c’était son premier matin .C’est ainsi que s’alternent les nuits et les jours, le non-être et l’être, si je puis dire. . « C’est ainsi que l’être survient au non-être à chaque réveil». « La vie de l’homme n’est elle pas sous tendue par une force prodigieuse d’espérance, l’homme ne vit il pas que d’espérer vivre ? »(5)
1)Ontologie et temporalité de Jean Greisch puf
2)St Augustin confessions
3)Matthieu ch6 v 34
4)Lamartine meditations pooétiques
5) l’homme qui venait de Dieu. Joseph Moingt