Une levée d’excommunication « fulminée » jadis contre un « quarteron d’évêques » sacrés par Mgr Lefebvre ,fait couler beaucoup d’encre aujourd’hui. Je suis un peu gêné pour prendre part aux protestations car je trouve que l’excommunication est une pratique d’un autre âge. .Fulminer, c’est au sens propre, foudroyer (fulminare). Est ce évangélique que d’éradiquer ainsi des opposants même si ce sont de vieux schnocks un peu têtus ? Foudroyer ou brûler au bucher les hérétiques, les schismatiques et avec eux, pour faire bonne mesure, les prêtres qui tournent le dos aux fidèles, disent la messe en latin et s’habillent en soutane, me rappelle l’inquisition de triste mémoire. Si ce « quarteron » avant même le sacre et les ordinations « sauvages » s’était déjà coupé de la communion et n’avait donc pas reçu de mission, pourquoi avoir fulminé contre eux une excommunication ? D’autant que s’ils réunissent autour d’eux quelques baptisés qui leur ressemblent, ils rendent service à l’Eglise. Ils la débarrassent de chrétiens souvent bien « tristes » et qui de plus sont de « tristes » chrétiens. Il est, à mon avis, une réponse plus simple que l’excommunication, c’est le simple haussement d’épaule accompagné d’un soupir. L’excommunication n’apporte pas grand-chose et de plus sa levée fait scandale car elle donne l’illusion que ces évêques pourraient retrouver un diocèse. Quand à celui d’entr’eux qui est « négationniste», le scandale est double car cette levée passe pour de la complicité. Heureusement la déclaration du conseil permanent des évêques de France mets les pendules à l’heure en « condamnant fermement les paroles inacceptables et scandaleuses de Mgr Williamson ».Inacceptables et scandaleuses, oui sans doute, mais surtout insensées. Nier l’évidence et l’existence des chambres à gaz n’a pas de sens tant il y a de témoins directs encore vivants et de documents authentifiés. Cela ne mérite là aussi qu’un haussement d’épaule avec éventuellement une moue légèrement condescendante selon le bon principe que ce qui est excessif est insignifiant. Cet évêque « négationniste » irait il jusqu’à considérer la croix qu’il porte sur la poitrine comme un pur symbole sans rapport avec la Passion de Jésus ou bien à la manière des docétes des premiers siècles ,« négationnistes » à leur façon, nierait il jusqu’à l’existence réelle du crucifié qui n’aurait souffert qu’en apparence.? Si oui, je l’invite à méditer avec Jacques Sommet sur le charnier de Dachau.(1)
« A Dachau il y avait deux crématoires … Tous les jours des charriots de cadavres, aux gestes de pantins brisés, traversaient l’allée centrale du camp…l’odeur fade de leurs corps brulés, encens dérisoire, laisse un souvenir qui ne s’évanouit plus. En allant du coté de ces installations, je me suis trouvé devant un monceau de cadavres …Il m’a fallu du temps pour percevoir et exprimer un sens devant ce spectacle…Ces morts restent l’expression la plus profonde du mal..Leur présence de cadavres entassés est un échec, des montagnes de l’échec .Ils sont aussi une protestation pour la vie. Le silence de leur présence est une sorte d’immense cri. Silence de Dieu ? Dieu absent ? Oui et non, Le scandale du Dieu absent est remplacé pour le chrétien par le mystère du Dieu caché : Jésus vivant parmi les hommes, prenant cette existence sur le dos, la traversant dans tout ce qu’elle est …Ainsi toute la souffrance du monde est honorée par Celui qui prend le pas devant, qui la traverse sans la supprimer mais en lui donnant sens. »
Je laisse la parole maintenant à Maurice Bellet qui dans son livre « le Dieu sauvage »(2) nous entraîne avec le crucifié jusque dans « sa descente aux enfers » qu’il nomme l’abîme.
« Le visage du ressuscité, c’est d’abord celui du crucifié .Sa parole est celle d’un amour qui s’en est allé jusqu’au lieu de la violence extrême et qui s’est tenu là, jusque dans l’angoisse et l’extrême douleur, sans que la destruction soit le dernier mot .Dans cet homme là, le lieu de l’amour, c’est l’abîme …L’amour vit jusque sur la croix, l’amour vit par delà la grande mort….Le procès, la crucifixion, le resurgissement, c’est la traversée de l’abîme….le lieu de cet amour est l’abîme, quand il est traversé par l’homme resurgissant de « la ténèbre ». Parole nue comme Jésus en croix. Parole vêtue de lumière, comme le ressuscité : La vérité de cette parole, c’est qu’elle opère dans l’abîme la parution de l’être humain, libre de cette mort, habité d’un amour tout entier délivrance ; puissance donnée à chacun de naître par delà ce qui le tue : Tels seront les humains naissant en ce lieu là. »
Williamson comme le vieux Nicodème (3) naîtra peut être un jour à cette vraie vie par de là « l’aveuglement qui le tue », c’est la grâce qu’on lui souhaite. Après tout, St Paul était intégriste et plus violent que Williamson tandis qu’il enchaînait les chrétiens au nom de l’orthodoxie pharisienne. Il a connu son chemin de Damas. Williamson tombera peut être un jour comme Paul .Ce sera sur le « long chemin de Tipperary », la « route de Memphis » ou dans sa salle de bains. De ses yeux comme de ceux de Paul tomberont les écailles, il demandera pardon à nos frères juifs de ses propos insensées. Il recevra peut être alors la mission officielle d’accompagner le dialogue interreligieux avec les juifs, les musulmans et les bouddhistes ; on peut rêver, car « rien n’est impossible à Dieu »(4) !
(1) L’honneur de la liberté. Jacques Sommet. Le centurion
(2)Le Dieu sauvage .Maurice Bellet. Bayard
(3) Jean ch. 3/4à8
(4)Luc ch 18/24 à 2718 .Même les riches peuvent être sauvés car…