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trompe loa mort N°3

TROMPE LA MORT n° 3


Je vois que tu bailles. Encore quelques histoires et  je te laisse. En attendant, vidons la bouteille .Vois comme ce calva vieilli en fûts de chêne prend la teinte des  meubles  anciens, éclairés  par la flamme orange  de la cheminée.


Récit treizième : Les champignons

Les annamites épaisses  sont comestibles et  même gouleyantes. Vincent m’avait expliqué la différence avec  l’annamite panthère qui est mortelle. il y a  risque de confusion disent  les livres. Sur les chapeaux des  unes et des autres  des verrues mais grises- blanchâtres  sur  l’amanite épaisse et  blanche- grisâtre sur l’amanite panthère .Les lames  et le pied sont blancs de part et d’autre .La grande différence, c’est  la bulbe  qui est « en navet dans l’amanite épaisse et marginé dans la panthère. Mais la vraie différence  apparait le lendemain. D’un coté on se régale et de l’autre, on meurt dans d’atroces douleurs.

Dans  une futaie  aérée, je tombe  un jour sur une mine  d’amanites épaisses et remplis mon panier. Le soir même mes amanites passaient à la casserole et j’en faisais  mon souper. Vincent me téléphone, je lui raconte ma trouvaille  et ce que j’en ai fait. Je me suis fait engueuler :

. Comment as-tu pu prendre de tels risques ? Cela fait 25 ans que je ramasse des champignons  et jamais je n’oserais  ramasser des «  annamita  spissa »  de  peur de les confondre avec les panthères .

Le lendemain matin  Vincent prenait des nouvelles  de mon état de santé. « Trompe la mort » ne pouvait se tromper, j’étais en pleine forme .Mais je n’ose plus  ramasser les épaisses d’autant que l’on m’a dit que  les amanites panthères  sont très changeantes et prêtent à confusion .Sur mon livre il est dit : « L’amanite panthère est d’autant plus redoutable qu’elle est très variable .L’anneau fugace, peut manquer etc.  elle risque d’être confondue avec l’amanite épaisse..etc. »Le livre ajoute pour décourager les amateurs qu’elle est un médiocre comestible. Ce n’est pas  vrai  mais  comme le renard  de la Fontaine qui  n’atteignait pas les raisins, l’auteur   fait la fine bouche et dit : « ils sont trop verts et bon pour des goujats » .


récit quatorziéme : Bateau à voile

 Malade sur une balançoire de foire, je ne suis pas «  fan »  de bateau. Je préfère  le sable de la plage  pour m’éclater dans le vent en pilotant mon char à voile. On est secoué, on s’arrache parfois   les tendons de l’épaule, on se démet un genou  mais on n’est pas malade. Je n’ai terminé qu’une seule fois aux services d’urgence en 15 ans .

Un jour, on m’a proposé une ballade en mer sur  un petit voilier. Avec mon gout du risque, j’ai  finalement accepté. Je n’ai pas été malade mais j’ai failli  me noyer. On a dessalé au large, quille en l’air. Nous étions tous deux à califourchon sur cette quille .Une drisse  me liait  à l’extrémité du mat car  on avait dessalé tandis que je faisais contrepoids au trapèze. Le canot  des secours  prévenu par ma soeur qui de la grêve  scrutait la scéne  à la jumelle marine , est venu  proposer ses services. Mais  l’ami a refusé, on allait s’en sortir tout seuls comme des grands. .Effectivement, on a réussi à redresser le bateau mais la  drisse à laquelle j’étais toujours attaché  faisait le tour de la coque, elle  me maintenait  comme une main de tortionnaire  en dessous  du niveau de l’eau et m’empêchait de monter à bord. Elle me faisait boire  la tasse avec grande largesse. Je n’ai pas réussi à me détacher et ne pouvait vaguement respirer  que  dans le court  instant où la vague était  en creux .Me voyant  dans un triste état, me débattant comme un beau diable , mon ami  a daigné  enfin  se pencher  pour  me délier. Il était temps, J’étais rouge   et vert, de l’eau de mer plein l’estomac, peut être  plein les poumons .On avait cassé   le gouvernail. On a du rentrer  en utilisant le foc. Les courants nous ont emportés  bien loin  de l’endroit ou nous étions partis. Il nous a fallut  trainer  le porte bateau  sur des kilomètres. J’étais vacciné et bien décidé à ne plus jamais tenter pareille aventure. Mon marin, compagnon d’infortune, est devenu archevêque et mène la « barque de Pierre ».Que Dieu lui pardonne ce cruel dessalage, une  quasi- noyade. Quand à moi  je ne pilote  toujours que mon vieux char attaché au sable ferme,  à  la marée basse  et au vent .Mais les années ont passé. J’ai oublié l’archevêque  .Les amis du club de voile  m’ont proposé une ballade  en mer  par beau temps. Le vent était trop faible pour arracher au sable  mon vieux char et mes 100 kilos .Je me suis laissé de nouveau embarquer. Comme j’étais  encore le  moussaillon,  les copains ont voulu  me «  baptiser »à la maniére des marins qui passent l'équateur pour la premiére fois. J’étais assis  sur  le rebord .Un copain à l’étrier, a pris son élan pour me pousser à l’eau des deux pieds mais la drisse  a cassée (ce qui n’arrive jamais) et c’est lui qui a plongé. Depuis, les marins de la base me considèrent comme un intouchable, plus ou moins  protégé des dieux. « Qu’est ce que l’homme ? Il est cette force  qui finit par balancer  les tyrans et les dieux » écrivait Camus, dans « l’homme révolté »."il y avait décidément  en moi un été invincible".



 récit quinzième  le mont blanc

"L'homme ce fou rêveur d'un piêtre mondicule

Quand on y pense bien ,est par trop ridicule" Jules Laforgue.

 

J’y suis monté par Chamonix, avec un guide d’une autre vallée, un 16 Aout le lendemain de la  fête des guides. Les guides de Chamonix se reposaient de leur fête. Il n’y avait pas trop de monde au refuge, sur la trace, et au sommet, malgré le grand beau .Par le refuge des cosmiques, il y a  trois monts, tous blancs pour le prix d’un. Le mont blanc du Tacul , le mont Maudit, puis le Mont blanc. Je me souviens avoir vu  dans l’ascension du mont Maudit  une nouvelle constellation .Les étoiles  étaient  nombreuses, en file  indienne  à serpenter  au dessus de nous  à la verticale. J’ai demandé au guide  quel était cette constellation inconnue. Il m’a regardé curieusement  et m’a dit : «  ce ne sont pas des étoiles, ce sont les lampes frontales des cordées qui nous précédent ».Je me suis demandé comment j’allai  réussir à   rejoindre sans échelle, les alpinistes  lumineux  qui flirtaient  déjà avec les étoiles.  .J’ai marmonné dans mes dents : «  Mont Maudit, Maudit mont , sois maudit. Je t’aurai. » Et je l’ai eu, grâce à la patience du guide .Je suis arrivé dans un triste état  au sommet. Mais quel spectacle ! En voulant sortir mon appareil photo pour immortaliser l'événement , j’ai sorti ma gourde  qui a dévalé la pente du coté italien et s’est embroché sur les  fines aiguilles des « dames anglaises. »Bonjour la soif à la descente ! Je me suis rattrapé avec  un énorme pichet  de bière  au premier bistrot  à Chamonix qui  , le temps d'avaler  mon "formidable" avec son pichet à deux anses, devenait  capitale de la Baviére.De la terrasse, le  sommet  blanc    devenait rose  .Etait ce la biére ou le couchant ?  Il était grand temps de rentrer.

 

alpinisme,imprudence,champignons douteux,la grande chible,la roche de solutré

 Récit seizième : la grande chible

 

The last but non the least(Sh.)

Certains racontent   parfois quelque chose   qui leur est arrivé et pour donner du sel au récit ajoutent : « J’ai cru que ma dernière heure était arrivée ».J’ai vécu une  telle expérience .Mais il ne fût pas question  d’une dernière heure .Ce fût l’affaire de  quelques secondes, « mes dernières secondes étaient arrivées ».

Voila ! C’est fini, « The end ».Dans une vire  ascendante et délitée, un  gros paquet de schistes  s’est détaché, m’a déséquilibré et emporté  en arrière dans le vide. « C’est fini » ! Un petit pincement à l’estomac, pas plus, durant les 3  à 4 secondes  qu’a duré la chute .Finalement  ce n’est pas difficile de mourir  quand  on n’a pas choisi  de se donner la mort et qu’il n’y a rien pour se rattraper.

 Mais Quinze mètres plus bas , une  sellette de neige  m’a reçue  sur le dos  avec l’amorti du sac .J’étais  à 2800 mètres. Une fois de plus j’avais trompé la mort. J’étais blessé (machoire cassée) mais d’abord dans mon amour propre alors que  les compagnons  de cordée m’avaient fait confiance pour les guider dans cette course assez facile. Vexé  car, par mon  imprudence, je les privais  d’une belle ballade. Apres un mois à l’hopital,(l'hopital de la " sale tronche" à Grenoble) chouchouté par  ma petite soeur,  j’ai retrouvé mon nez mais perdu à jamais  l’illusion d’être immortel.

« Il est tard, mon petit, le feu s’éteint et mon verre est vide, je vais  regagner mon lit avec  une certaine crainte  car  90% des gens y trouvent une mort à laquelle ils ont mille fois échappés dans leur vie active. Si  tu ne  me vois pas demain matin, pousse la porte de ma chambre pour voir si, pour une fois, ce ne serait  pas la mort qui  m'aurait trompé ,moi, «  trompe la mort » et m' aurai joué un tour à sa façon . Si tu m’entends ronfler descends à la cuisine,  fait moi un bon café et  ranime le feu. L’hiver n’est pas  tout à fait fini»



 

 

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