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bona hora

  • arbre aux papillons 4

    chapitre 4  : larbre aux papillons 4

    Certains pensent que « le bonheur est dans le pré et ils y courent ». Une heure plus tard, en petites foulées le long du chemin de halage, ils sont dans la campagne riante. C’est l’échappée belle, la Bona Hora, la bonne heure. « I enjoy myself ». Cette échappée est d’autant plus belle que le canal, autrefois artère vitale pour l’industrie et qui était devenu un égout à ciel ouvert est devenu lieu de promenade et lieu de pêche. Merci aux « visionnaires » et aux fonds européens à qui l’on doit ce bonheur. Merci au nom des nombreux sociétaires de la grande société de pêche, la plus grande association de la ville. Merci à ces visionnaires au nom des cyclistes qui en trois coups de pédales se retrouvent sur les bords riants de l’Escaut. Au retour du paradis c’est de nouveau le bain de vie, la chaleur de l’amitié et les arbres aux papillons.

    Certains disent que le bonheur n‘existe pas, pas plus dans les prés que dans le quartier. Ceux là traînent leur ennui. Ils ont cru au miracle mais rien n’est venu. Alors ils invoquent la malchance et la méchanceté des gens Ils évoquent le temps béni où l’on ne craignait pas la violence et les trafics en tout genre. Bien des adresses , bien des maisons pour leur remonter le moral :  il y a le 105, le 127, le 94, le 40,il y a aussi chez léo , le dispensaire des sœurs, les centres sociaux, les comités de quartier ,le centre travail et culture et bien d’autres adresses comme la courée de Denise qu’elle compare au paradis.

    Faut-il débaptiser la rue Condorcet ? L’appeler rue du «  Buddleia Davidii » par exemple, le nom savant de l‘arbre aux papillons ou, plus communément, rue du « père David ». Je ne crois pas que les gens seraient d’accord. Ils apprécient les progrès de la médecine, la qualité de l’image télévisuelle, la facilité des échanges informatisés. S’ils ont perdu l’optimisme des « philosophes des lumières », ils gardent toujours l’espoir dans la capacité des hommes à développer les connaissances. Plus prosaïquement, ils n’aimeraient pas changer d’adresse. Beaucoup ne connaissent pas Condorcet mais ils ont, à la longue, appris à écrire son nom. Enfin, ce n’est pas le moment. On va restaurer la friche pour y faire des logements. Ils appellent cela un Loft : littéralement, un « grenier aménagé », aménagé pour qui ?  That is the question.

    La rue va changer de look, elle a déjà perdu les arbres à papillons du 18, cette maison qui a vu grandir de si nombreux enfants. Ses pavés ont déjà laissé place à un tout nouvel enrobé. Gardera-t-elle la richesse de cœur de ses habitants qui croient au bonheur « avec modération » mais en vivent à « fleur de peau », qui ne croient plus aux lendemains qui chantent, mais vivent la Bona Hora à « fleur de temps » dans le plus quotidien de leur vie. Serait ce là le secret des « béatitudes » ? (5) /

     

     (5) Évangile de Mathieu ch. 5