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naître sur la paille

  • Noël en paille

     

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    « L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable »(1)

    « Huit chevaux, 40 hommes ».C’était  marqué en lettres blanches  sur une planche    bordeau délavé au coin du wagon. Un ballot de paille fraiche pour   30  parachutistes ; c’était la nuit de Noël, le train filait vers le Sud, les Aurès. Avant d’être  des paras de choc, c’était des jeunes paysans, ouvriers, marins pécheurs des villes et des campagnes de France  qu’on envoyait en Afrique faire une guerre dont ils ne comprenaient pas  l’enjeu. Il a suffit  d’un harmonica  pour qu’ils se mettent à chanter  des vieux Noël. Les marseillais qui ne connaissaient de la religion que la bonne mère  vue la veille  disparaitre dans la brume  tandis que le bateau s’éloignait  des côtes de France, chantaient  eux aussi  des still narcht avec des accents  de canebière  à réveiller  « l’enfant sur la paille endormi » .Eux qui n’étaient pas des anges  chantaient  avec la troupe   des « anges dans les campagnes  kabyles» .L’harmonica jouait  du Hautbois  et résonnait musette .On a chanté toute la nuit avec des voix  cassées d’avoir  déjà crié  de Pau à Marseille  notre refus de cette guerre. On a chanté  jusqu'à notre arrivée à Batna.

    « Je crois à ce chant au milieu de la nuit  qui rend digne les plus humbles mais que les haïsseurs du monde, les profiteurs, les dominateurs veulent faire taire à tout prix. »

     Au cours d’une  messe de minuit  classique. Le prêtre  commence son sermon en parlant  des galères d’une famille sur la paille. Il continue   en  annonçant  leur présence dans l’assistance."D'ailleurs,mes fréres,ils sont là,ils se sont invités à cette messe de minuit"  Les gens se demandent qui  ça peut bien être, ils  se retournent  et ne voient rien. Alors, le prêtre dévoile le nom de ces gens : La femme s’appelle Marie, le mari Joseph et l’enfant, c’est Jésus, ils ont tous les trois les pieds dans la paille.… « Vous  pourrez  vérifier  en sortant, c’est moi-même qui   ai  mis la paille  dans la crèche».

    « Je crois en un Dieu si fragile  qu’il abandonne  sa vie  entre les mains réunies d’un homme et d’une femme » «Je crois en ce murmure, aussi fragile qu’il soit, c’est le murmure du monde, le babillage de l’enfant-Dieu né pauvre parmi les pauvres »(2) 

      Est-ce bien raisonnable ? Robert  a  claqué  sa  modeste  prime   de fin d’année  pour acheter   un magnétophone et quelques disques  pour  la soirée de Noël. Le carton  d’emballage est bourré de  paillettes brillantes et colorées. Vu les finances  de la famille, ce n’est pas raisonnable mais  il s’explique : « Mes gosses ont le droit  à de la musique, c’est Noël  aussi pour eux .On est sur la paille,  c’est vrai, mais, un peu plus un peu moins !» Robert a, pour une nuit, coloré  la paille   sur laquelle  il  vit  avec sa famille, la paille est devenue paillette, or et argent. Il a décoré le taudis   d’étoiles  pour que  brille la joie  dans les yeux de ses enfants.  Dans le même esprit, les «  humanitaires » de différentes asso ont organisé une fête avec  les familles  roms   dans l’enclos  où ils vivent. Ils ont  reçus  leur récompense  en voyant  briller  la joie dans les yeux des enfants. 

    « Je crois qu’à la vue de l’étoile  chacun a le sentiment d’être appelé  par son nom, d’être plus qu’un chiffre  mais un homme, une femme, un jeune, un enfant respecté de tous » « Je crois que ces sourires d’enfants éclairent d’une promesse d’aube le visage de l’homme et de la femme » « Je crois qu’il donne de l’allégresse à leur souffle, des couleurs malgré l’obscurité qui règne ,et il les met en route vers  bien plus loin qu’ils n’ont jamais espéré ».(2)

     Dans un village  éloigné de la Champagne humide, j’ai vu  dans la crèche de la laine de verre  défraichie  et sale .On avait couché Jésus sur  ce poil à gratter. La taille du silo sur le plateau me faisait dire qu’il ne manquait pas de paille   au pays. J’ai fait  une remarque .Elle a provoqué de la consternation. Depuis ce jour, on renouvelle chaque année la paille. de la crêche. Chacun voulant  apporter   sa poignée de paille fraiche, il a fallut  faire un tour de rôle  pour que la plus petite ferme ne soit pas oubliée .On a évité  ainsi la « lutte des pailles ». Cette année, La  sécheresse  ayant privé de foin  l’Auvergne,  l'Aquitaine et le charolais, ce n’est pas une  poignée  de paille qu’il a fallut donner  pour la crèche  mais un wagon entier  pour le bétail des  contrées  assoiffées. C’est sans doute cela  un  Noël de partage   " Gloire à Dieu  et paix sur terre aux hommes de bonne volonté" chantent les anges..

    « Je crois que cette onde de vie est Esprit qui donne à chacun de nous l’audace d’être  comme un ange qui vient  au secours de ses frères ,de ses sœurs, de ses collègues, de ses amis en détresse. Un ange qui éclaire, console, sourire de l’enfant Dieu.(2)

     Au 17 éme siècle, dans une nativité  de  Jean De bray, on voit Joseph en palefrenier saisir une brassée  de paille fraiche  pour installer  Marie et Jésus ,par contre  au 14 éme,15 éme et 16 éme siècle  ,les peintres  de nativité posent  souvent l’enfant Jésus sur de beaux coussins rouges  , sur du marbre ou  dans les riches tissus de la robe de sa mère ,n’imaginant pas que  le fils  de  Dieu puisse  vivre  sur la paille  comme le fils du dernier des  manants.Je vous renvoie au diaporama que je vous offre pour Samedi prochain 24 Décembre.Vous y verrez  dans des  peintures de Bartholoméo,Lorenzo,de Beer,le Perrugin etc. un enfant Jésus  dans "la soie",et aussi  Le Joseph en palefrenier de de Braye . et quelques étables de" luxe" avec en prime   le  choeur des anges ."pas belle la vie ?"

    (1) Verlaine. Sagesse.

    (2) « Dieu mis au monde » : Psaume  de la mission ouvrière  Noël 2011.