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objection de conscience

  • les Aurés

     

     

     

     

     

     

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     Dans un grand crissement  de frein Le train s’arrête. Je regarde !  Nous sommes dans un pauvre  village. C’est un assemblage  hétéroclite   de petites maisons en torchis, un montagnard  monté sur un âne  les pieds dans la poussière  longe la voie de chemin de fer. Ou va t il donc de si bon matin ? C’est Noël, c’est triste les matins de Noël  surtout quand on n’a pas trop bien dormi, que le temps est maussade, froid et maussade et qu’on se rappelle la chaleur de la nuit dans la paille  à  chanter  les vieux Noël de notre enfance. Ici pas de clocher ni de  tintement de cloche. Un vague minaret  puis un appel à la prière au loin.  Un sous officier passe et nous indique  qu’une grenade  a explosé dans un café  en ville   faisant plusieurs morts. Il  nous ordonne de fermer les portes  par sécurité en laissant  ce qu'il fallait pour  le fusil mitrailleur. Nous voici  vraiment  enfermé  et  presqu’en guerre déjà. Je me couche et j’essaye de dormir. Trop de choses me trottent dans la tête : La  larme  au coin de l’œil de mon père, la première larme  que je lui ai vu verser  tandis qu’il me conduisait à la gare  à la fin de la dernière permission ; Les cris des  5000  soldats  dans la gare de Pau   hurlant   aux officiers  médusés leur refus de la guerre ; Les coteaux  de Provence  et les garrigues  qui s’éloignent  doucement  comme la bonne mère  tandis  qu’ avance en mer  notre grand bateau blanc. Alger la blanche dans le soleil à l’arrivée  et très vite l’embarquement dans ces wagons à bestiaux alors que mon frère est  chez les fusillés  marins  dans le coin le plus dur  à L’est d’Oran. Mon père n’a pas voulu intervenir pour  qu’il soit rapatrié alors que la règle était bien  que deux frères ne pouvaient  pas  à l’époque être en même temps  en guerre.

    Les pieds dans la paille, on a  toute la nuit, « joué et chanté»  Noel . Dans cette étable roulante, on était  tout à la fois   l’âne et le bœuf et Joseph et Marie et les bergers  et les mages. Le jour se lève  et avec lui  disparaissent la magie et le rêve .Nous ne sommes pas à Bethléem .A la descente du train, on nous distribue  des fusils, fini de rire. Les anges de la nuit se sont tus : plus de vieux Noël ! Y a-t-il  encore une paix possible sur terre  ouverte aux hommes de bonne volonté. ?

     

     (1)A l’époque, l’état  n’avait pas pris en compte la conscience individuelle  du pacifiste. L’objecteur de conscience  était considéré comme un délinquant  et le refus de porter les armes un délit.

    (2)Trois mois plus tard  on a eu la réponse, Yves avait  tenu parole, il  était  rentré à la caserne  7 jours  pile  après son échappée, il  avait fait  15 jours de prison  ,subi  un nouvel  entrainement .Puis  on  l’avait   réexpédié   sous bonne garde en Algérie. Comme  Il ne montrait pas  une  grande ardeur au combat, l’armée  n’a pas retardé  sa  libération pour le punir. Il a été démobilisé au début de l’été  en même temps que nous .Il était temps car un maréchal des logis l'avait pris en grippe et le persécutait. Il a même fallut qu'un jour un copain  baraqué  s'engage physiquement pour le défendre .Quelques mois de vacances et  il reprenait  son travail d’instit. Comment pouvait-il expliquer aux écoliers français la grandeur de l’empire colonial français ? Ce monde coloré, atlas   aux couleurs de la France  étalées sur les 4 continents avec  les grandes  taches   africaines  de l’AOF et de l’AEF qui se prolongeaient  vers le Nord jusqu’à la méditerranée. J’aurais  volontiers  écouté    son explication. Peut être a t’il décroché  des   murs de la communale  les cartes   à œillets cuivrés de l’atlas officiel  ?