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travailleurs en lute

  • Le verre d'eau

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     manif.jpgL e verre d’eau

     

    Toute l’équipe syndicale était à la préfecture  à la recherche d’une issue au conflit. Restait Fernand  avec  les travailleurs au piquet de grève  et   pour occuper l’usine. Il faisait bien chaud ce jour là et la consigne  était : pas d’alcool  sur la cour (pour éviter tout débordement).  De l’eau, rien  que de l’eau. Or l’eau vint à manquer(1).C’est  la première chose que Fernand m’a demandé, quand je lui ai proposé mon aide. Il laissait les grandes questions de stratégie  aux responsables  syndicaux et  se  préoccupait  de l’intendance .Mais  qui étais-je pour fournir de l’eau à 500 travailleurs. Je venais d’emménager  dans la ville  et avait été  attiré et guidé vers cette usine par  le panache de fumée noire qui  montait  bien haut, dessus   un bûcher de  gros pneus. En faisant mes courses, je mets  à tout hasard dans le caddy, un pact d’eau minérale  et  en passant, Je  m’arrête de nouveau devant les grilles fermées de la grande cour. Une grande banderole, des drapeaux, c’est bien là .Je m’extraie de la voiture  avec le pact à la main, Fernand  vient m’ouvrir.C’est alors que l’incroyable s’est produit .Une masse d’hommes s’est approché de l’entrée puis s’est écartée pour me laisser le passage. Je fus accueilli  comme  si j’apportais  du champagne  avec  la solution  miracle pour une sortie de conflit . Une haie d’honneur de plus de 100 mètres  s’est formée  avec de chaque coté, des travailleurs qui frappaient  en cadence  dans leurs mains .Ils m’ont accompagné  ainsi   jusqu’à  la table à tréteaux qui  servait de buvette .Qu’est ce que 6 bouteilles d’eau pour tant de monde ?  Ce n’est guère que de l’eau, que diable !(1bis) C’est sans doute le geste  qui  comptait : la main tendue d’un  retraité inconnu dans un conflit à l’issue incertaine et cela, je l’ai appris plus tard, dans une entreprise  soumise déjà à plusieurs restructurations. J’ai pensé au simple verre d’eau fraîche donné aux petits dont nous parle  Jésus  dans l’évangile de Marc  au  chapitre 9  , «  je vous le dis en vérité, il ne perdra pas sa récompense. ». (2)Effectivement, j’avais ma récompense  au delà du raisonnable dans   l’accueil  chaleureux  que  m’ont réservé  ces travailleurs .(3)      Je   suis resté 5 ans dans cette ville et  à ma grande honte on ne m’a jamais servi  de l’eau, même par les grandes chaleurs. « De l’eau ? Vous n’y pensez pas .Il n’y a pas d’eau ici  sinon pour arroser les géraniums et le pastis. » C'est ainsi que l'on pratique l'hospitalité en Bragardie

     

    (1)C'était l'anti Cana.St Jean ch 2/ 3: "ils n'ont plus de vin".

    (1bis)" Quiconque boit de cette eau aura encore soif,mais qui boira l'eau que je lui donnerai,n'aura plus jamais soif ,Elle deviendra en lui  une source d'eau jaillissant en vie éternelle" (Jean ch. 13).Cette eau que Jésus s'engage à donner,  c'est l'eau  vive du partage,de la fraternité,d' une vie solidaire qui a sa source en Dieu. Ces travailleurs en lutte  vivaient la fraterrnité par tonneaux entiers, mes 6 litres   d'eau minérale  ne faisaient pas le poids.C'était une  goutte d'eau  dans un océan  de solidarité

    .(2) "Quiconque donnera à boire,ne serait ce  qu'un verre d'eau fraîche,à l'un de ces petits,en vérité je vous le déclare,il ne perdra pas sa récompense"  

    (3) Fallait il qu'ils soient  dans   la détresse pour appalaudir le moindre geste de  sympathie  et  mes 6 litres de flotte.